bon maintenant ça suffit
Me faire virer des scouts a été un des premiers enchantements de ma vie.
Enfin renoncer à ces débilités néo-naïves à balles deux a été une expérience d'une jouissance sans bornes, et je n'ai pas peur des mots.
Comme je détestais m'habiller dans cet uniforme bleu marine! Me contempler dans le miroir ainsi vêtue provoquait d'année en année nausée sur nausée. Pourquoi continuer? Ben tout simplement parce qu'on m'y a obligée, et que le seul moyen que j'ai trouvé pour arrêter, c'est de me faire virer.
Tout a commencé un matin de septembre 1982, où ma mère m'a demandé de mettre une paire de chaussettes blanches et une autre de chaussettes bleues. Gn? J'avais sorti une paire bleu ciel fort seyante, et non, fallait une paire bleu marine moche caca.
Depuis j'ai développé une névrose quant aux chaussettes, demandez donc à angel, car toutes tailles confondues mes enfants ont bien une centaine de paires. Avec ça une allergie profonde au bleu marine, allez comprendre, vous.
Alors vinrent des années où j'ai dû supporter des systèmes de hiérarchies à la con, d'insignes en tous genres, et de camps d'été.
Le pire, c'est vraiment le camp d'été d'ailleurs. J'en ai des souvenirs très nets. Dès mes neuf ans, je cherchais par tous les moyens à rentrer chez moi pour rejoindre mes parents, plutôt que de boire du chocolat chaud au goût de fumée dans des gobelets à la propreté douteuse, de me laver au jet d'eau froide ou de dormir sur un tapis de sol épais comme une feuille d'alu. Une fois j'ai fait genre j'étais malade, ça n'a pas marché, puis j'ai enchaîné sur "mon papa est malade faut que je rentre", mais on m'a fait prier pour sa santé. Je détestais ces odeurs de chien mouillé, ces levers aux aurores, cette crasse accumulée.
J'ai une théorie. Quand on vous oblige à un truc pendant super longtemps, au bout d'un moment, vous développez une résistance puis une aversion totale envers ce qui vous oppresse.
On m'a obligée à aller à la messe en latin, agenouilli agenouilla, encens, confesse-toi , cathéchisme intégriste, latinus et sermons: j'ai commencé par attendre les autres sous le porche de l'église mais en fin de compte je suis athée, comment serait-ce possible autrement?
On m'a obligée à l'habiller en bleu marine, ceinturon, chemise dans la jupe culotte et pataugas: j'ai commencé par ne plus me coiffer, puis par ne plus ranger ma chemise dans la jupe, puis j'ai eu ma petite apothéose avec ma paire de jeans troués.
On m'a obligée à chanter des chansons molles et insignifiantes voire empreintes d'une miévrerie hallucinante, et c'est dans ce contexte que j'ai commencé à écouter Guns 'n Roses (on fait ce qu'on peut) puis Metallica, puis après carrément du trash metal.
On m'a obligée à faire des pélerinages à Chartres, et oui, dix kilomètres à huit ans c'est possible je l'ai fait, mais je n'ai jamais pu concevoir remettre les pieds dans cette ville. Elle est sans doute jolie tout plein, hein.
On m'a obligée à veiller près du feu pour qu'il ne s'éteigne pas, à aller en forêt la nuit que maintenant je suis une trouillée.
Tout ça pour dire qu'un jour, j'en ai eu marre des insignes sur mon pull, j'ai mis mon jean troué et le foulard sur la tête, et je suis allée fumer dans les bois. Et en plus j'en ai entraîné d'autres.
Pendant un camp d'été.
(Mal)heureuse, qu'ai-je fait!
On m'a mise à la porte en chuchotant à ma mère"han ma pauvre dame, votre fille, va falloir faire quelque chose" ce à quoi ma propre mère que des fois quand même elle a des éclairs de lucidité "hé ho ça ne vous regarde pas et elle est sûrement mieux sans vous!". Dommage qu'il lui ai fallu tout ce temps pour comprendre.
Je dois bien avoir quelques photos quelque part, quoique si ça se trouve, tout a brûlé quand je me suis tournée de l'autre côté de la force.
Enfin renoncer à ces débilités néo-naïves à balles deux a été une expérience d'une jouissance sans bornes, et je n'ai pas peur des mots.
Comme je détestais m'habiller dans cet uniforme bleu marine! Me contempler dans le miroir ainsi vêtue provoquait d'année en année nausée sur nausée. Pourquoi continuer? Ben tout simplement parce qu'on m'y a obligée, et que le seul moyen que j'ai trouvé pour arrêter, c'est de me faire virer.
Tout a commencé un matin de septembre 1982, où ma mère m'a demandé de mettre une paire de chaussettes blanches et une autre de chaussettes bleues. Gn? J'avais sorti une paire bleu ciel fort seyante, et non, fallait une paire bleu marine moche caca.
Depuis j'ai développé une névrose quant aux chaussettes, demandez donc à angel, car toutes tailles confondues mes enfants ont bien une centaine de paires. Avec ça une allergie profonde au bleu marine, allez comprendre, vous.
Alors vinrent des années où j'ai dû supporter des systèmes de hiérarchies à la con, d'insignes en tous genres, et de camps d'été.
Le pire, c'est vraiment le camp d'été d'ailleurs. J'en ai des souvenirs très nets. Dès mes neuf ans, je cherchais par tous les moyens à rentrer chez moi pour rejoindre mes parents, plutôt que de boire du chocolat chaud au goût de fumée dans des gobelets à la propreté douteuse, de me laver au jet d'eau froide ou de dormir sur un tapis de sol épais comme une feuille d'alu. Une fois j'ai fait genre j'étais malade, ça n'a pas marché, puis j'ai enchaîné sur "mon papa est malade faut que je rentre", mais on m'a fait prier pour sa santé. Je détestais ces odeurs de chien mouillé, ces levers aux aurores, cette crasse accumulée.
J'ai une théorie. Quand on vous oblige à un truc pendant super longtemps, au bout d'un moment, vous développez une résistance puis une aversion totale envers ce qui vous oppresse.
On m'a obligée à aller à la messe en latin, agenouilli agenouilla, encens, confesse-toi , cathéchisme intégriste, latinus et sermons: j'ai commencé par attendre les autres sous le porche de l'église mais en fin de compte je suis athée, comment serait-ce possible autrement?
On m'a obligée à l'habiller en bleu marine, ceinturon, chemise dans la jupe culotte et pataugas: j'ai commencé par ne plus me coiffer, puis par ne plus ranger ma chemise dans la jupe, puis j'ai eu ma petite apothéose avec ma paire de jeans troués.
On m'a obligée à chanter des chansons molles et insignifiantes voire empreintes d'une miévrerie hallucinante, et c'est dans ce contexte que j'ai commencé à écouter Guns 'n Roses (on fait ce qu'on peut) puis Metallica, puis après carrément du trash metal.
On m'a obligée à faire des pélerinages à Chartres, et oui, dix kilomètres à huit ans c'est possible je l'ai fait, mais je n'ai jamais pu concevoir remettre les pieds dans cette ville. Elle est sans doute jolie tout plein, hein.
On m'a obligée à veiller près du feu pour qu'il ne s'éteigne pas, à aller en forêt la nuit que maintenant je suis une trouillée.
Tout ça pour dire qu'un jour, j'en ai eu marre des insignes sur mon pull, j'ai mis mon jean troué et le foulard sur la tête, et je suis allée fumer dans les bois. Et en plus j'en ai entraîné d'autres.
Pendant un camp d'été.
(Mal)heureuse, qu'ai-je fait!
On m'a mise à la porte en chuchotant à ma mère"han ma pauvre dame, votre fille, va falloir faire quelque chose" ce à quoi ma propre mère que des fois quand même elle a des éclairs de lucidité "hé ho ça ne vous regarde pas et elle est sûrement mieux sans vous!". Dommage qu'il lui ai fallu tout ce temps pour comprendre.
Je dois bien avoir quelques photos quelque part, quoique si ça se trouve, tout a brûlé quand je me suis tournée de l'autre côté de la force.
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